Une candidate qui ne manque pas de sel
C’est officiel depuis le vendredi 26 mars : la baguette de pain représentera la France pour la candidature 2022 au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco.
Les pays avaient jusqu’au 31 mars 2021 pour soumettre une seule candidature à l’Unesco. Sans attendre cette date limite, la France a tranché en faveur de son pain le plus célèbre.
Près d'une centaine de dossiers dans le monde décrochent chaque année cette prestigieuse inscription au patrimoine des biens immatériels.
Mais avant d’en arriver là, le projet doit d'abord être inscrit à l'inventaire national et être jugé apte à être présenté à l'Unesco, sur avis consultatif du Comité du Patrimoine ethnologique et immatériel (CPEI).
Il doit aussi fédérer une communauté, en l’occurrence celle des artisans boulangers qui défendent la baguette artisanale face aux menaces de la mondialisation et de l'industrialisation.
Pour la candidature de la France en 2022, les baguettes de pain ont finalement été préférées aux toits en zinc de Paris et au Biou d'Arbois (une fête vinicole traditionnelle du Jura) car elles sont plus largement connues et plus fédératrices.
Un savoir-faire menacé
Si les boulangers français espèrent voir la baguette entrer au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco, ce n’est pas seulement pour valoriser ce pain emblématique…
C’est aussi et surtout pour préserver leur métier et leur savoir-faire. Le pain artisanal est aujourd’hui concurrencé par les pains industriels et de plus en plus de boulangeries rurales ferment.
Dans un communiqué, le ministère de la Culture constate que le nombre de boulangeries est en constante baisse, notamment dans les communes rurales : "En 1970 on comptait 55.000 boulangeries artisanales (une pour 790 habitants) contre 35.000 aujourd’hui (une pour 2000 habitants), souvent au profit de la vente de baguettes produites industriellement".
"Après quatre ans de travail, c'est une grande fierté que notre dossier ait été choisi par la France", a déclaré à l'AFP Dominique Anract, président de la Confédération nationale de la Boulangerie-Pâtisserie Française (CNBPF).
"Cela valorise notre savoir-faire et cela peut inciter des jeunes à choisir le métier car il y a beaucoup de postes à pourvoir dans la boulangerie", a-t-il ajouté.
Un art de vivre à la française
Depuis que cette appellation est apparue au début du XXe siècle à Paris, la "baguette" incarne la France, sa gastronomie et son art de vivre.
Véritable emblème représentant notre pays dans les films - au même titre que la tour Eiffel - la baguette de pain est un produit plus complexe qu’il n’y paraît.
"C’est un produit noble et faussement simple, il faut des années, à partir de quelques ingrédients, pour trouver sa signature, sa patte ! Ce produit nous réunit et c’est à ce titre que je l’ai choisi.", a expliqué la ministre de la Culture Roselyne Bachelot au Parisien, juste avant son hospitalisation pour cause de Covid-19.
Nous en mangeons chaque année dix milliards, c'est-à-dire une demi-baguette par jour et par Français.
En effet, même si elle ne contient que quatre ingrédients (farine, eau, sel et levure ou levain), quoi de meilleur qu’une bonne baguette avec une croûte croustillante et une mie alvéolée
C’est ainsi qu’elle doit être lorsqu'elle est faite dans les règles de l’art.
"Il faut dix ans pour faire un bon boulanger et beaucoup de temps pour faire une bonne baguette.", explique Dominique Anract.
Ce produit incontournable dans le quotidien des Français sera-t-il finalement inscrit au patrimoine culturel immatériel de l'Unesco Pour le savoir, il faudra encore un peu patienter. La décision finale appartient à l’Unesco, qui se prononcera à l’automne 2022.
