Prix Goncourt : les anecdotes du prix littéraire en 8 dates

Le Prix Goncourt 2020 a été attribué à Hervé Le Tellier pour L'Anomalie. Mais connaissez-vous la petite histoire de ce célèbre prix littéraire Lancée en 1903, cette prestigieuse récompense a suscité son lot de couacs, de surprises et d'anecdotes. On vous raconte tout en 8 dates clés.


1932 : la défaite de Céline

Le Prix Goncourt, qui a été attribué pour la première fois en 1903, est considéré comme la consécration la plus prestigieuse pour un auteur de la littérature francophone.
S’il a couronné de grands écrivains comme Marcel Proust pour À l’ombre des jeunes filles en fleurs ou André Malraux pour La Condition humaine, ce prix a aussi échappé à d’autres auteurs célèbres comme Apollinaire et Colette.
Mais la défaite la plus célèbre reste celle de Louis-Ferdinand Céline. En 1932, l’auteur du Voyage au bout de la nuit promet à son éditeur "le prix Goncourt dans un fauteuil". Il est pourtant recalé.
Ce verdict fait polémique et le monde de l’édition y voit le fruit de querelles au sein du jury plutôt que le jugement de l’œuvre elle-même. Céline dénonce la "crassouillerie" des "gendelettres" et se console avec le prix Renaudot et un immense succès.
L’écrivain aura finalement sa revanche en librairies, où son livre considéré aujourd'hui comme un chef-d'oeuvre deviendra un classique.

1951 : Julien Gracq lauréat contre son gré

En 1951, quand la rumeur attribue le Prix Goncourt à Julien Gracq pour Le Rivage des Syrtes, l’auteur fait savoir qu'il refusera cette récompense.
L'Académie Goncourt maintient pourtant son choix. "Nous choisissons le meilleur et nous n'avons pas à savoir ce qu'en pense l'objet de notre préférence !", déclare le président Raymond Queneau dans Le Petit Parisien.
Julien Gracq persistera toute sa vie dans son refus, qualifiant cet épisode d'"événement accidentel".

1958 : Un espion dans le placard

Beaucoup de férus de littérature rêveraient d’assister en catimini aux délibérations du Prix Goncourt mais un seul homme l’a fait…
En 1958, le futur journaliste Alain Ayache, alors âgé de 16 ans, parvient à se cacher dans un placard à balais au premier étage du restaurant Drouant suite à un pari.
Il récidive en 1983 et pousse la blague jusqu’à enregistrer clandestinement 90 minutes de délibérations du jury.
Il publie alors les échanges des jurés dans son magazine "Le Meilleur", rendant publics, pour une seule et unique fois, les secrets du salon littéraire le plus célèbre de France.

1975 : un deuxième prix pour Romain Gary

Peu de règles régissent l’attribution du Prix Goncourt mais l'une d'elles est immuable : on ne peut être récompensé qu’une fois.
Facétieux, l’auteur Romain Gary a trouvé le moyen de contourner ce règlement…
Déjà récompensé en 1956 pour Les Racines du ciel, il décroche à nouveau le Prix Goncourt en 1975 avec La Vie devant soi en publiant ce roman sous le pseudonyme d'Émile Ajar.
Pour tromper l’ensemble de l’intelligentsia parisienne, il demande à son cousin Paul Pavlowitch de tenir le rôle du lauréat face à la presse.
Cette supercherie ne sera dévoilée qu'à la mort de l'écrivain, en 1980, dans un livre posthume.

1986 : le sauvetage de Drouant

Depuis 1914, le Prix Goncourt est devenu indissociable du lieu où il est remis : le restaurant Drouant, rue Gaillon à Paris.
C’est là que se réunit traditionnellement le jury. Mais cette institution a bien failli disparaître !
En 1986, le propriétaire des lieux souhaite vendre le restaurant parisien à un Promoteur immobilier pour en faire des bureaux.
Heureusement, l’homme d’affaires Jean-Pierre Bansard rachète Drouant et promet de le conserver intact.
Depuis, le siège du Goncourt a résisté aux ventes successives de l’adresse.

2010 : la troisième fois est la bonne pour Houellebecq

En 2010, la désignation du Prix Goncourt semble cousue de fil blanc. Comme annoncé par la rumeur, Michel Houellebecq reçoit la prestigieuse récompense pour La Carte et le Territoire.
Le suspense est de courte durée puisque le vainqueur est désigné en 1 minute et 29 secondes précisément… Trop facile Pas vraiment !
Avant de décrocher cette consécration, Michel Houellebecq a été évincé du Goncourt deux fois : la première fois en 1998, avec Les particules élémentaires, et sept ans plus tard, à une voix près, avec La possibilité d'une île.

2013 : des femmes à barbe manifestent rue Gaillon

En plus de 115 ans d'existence, le Prix Goncourt a été attribué à une poignée de femmes (douze précisément à ce jour).
En 2013, pour dénoncer l’omniprésence des auteurs masculins, des militantes du collectif féministe "La Barbe" s'invitent devant chez Drouant affublées de postiches.
Le roman Chanson douce de Leïla Slimani, lauréate du prix 2016, leur offre un nouvel argument : il est l’un des Goncourt les plus vendus (écoulé à 800.000 exemplaires en France) et les plus traduits dans le monde (en 44 langues).

2020 : une proclamation à distance

Cette année, le Prix Goncourt a été décerné le lundi 30 novembre 2020, mais pas au restaurant Drouant comme le veut la tradition !
En raison de l’épidémie de Covid-19, le célèbre restaurant était fermé et la remise du prix a dû être adaptée aux contraintes sanitaires.
Initialement prévue le 10 novembre, l'annonce du lauréat a été repoussée au 30 novembre pour concorder avec la réouverture des librairies.
Les délibérations et l'annonce du lauréat ont été faites à distance. Les membres de l'Académie Goncourt ont ainsi donné rendez-vous aux journalistes à 12h30 sur la plateforme de visioconférence Zoom.
Quant à l’écrivain Hervé Le Tellier, il a fait l'expérience inédite de recevoir le plus prestigieux des prix littéraires par visioconférence ! Une "anomalie" qui aura sans doute amusé cette figure de l'Oulipo auteur du roman éponyme...

Date de création : 2020-12-01
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